- Un bar est un établissement recevant du public (ERP)
- Les ERP sont classifiés sous 2 groupes et 5 catégories selon leur capacité d’accueil et sous plusieurs types selon la nature de leur activité, par exemple N = Restaurants et débits de boissons, O = Hôtels et pensions de famille…
- Un ERP est soumis à des règles de sécurité incendie et accessibilité
- Le classement en ERP entraîne donc des travaux de mise en sécurité : les matériaux doivent avoir une résistance au feu, les sorties signalées, etc.
- Le personnel doit être formé pour évacuer…
Les faits dramatiques
Le Cuba Libre était un bar à Rouen qui a brûlé avec 14 victimes piégées dans un sous-sol dont la porte de secours était verrouillée. Ce sous-sol avait été aménagé sans autorisation, ce qui augmentait la capacité d’accueil. Les travaux avaient été faits en dépit du bon sens avec notamment une mousse isolante en polyuréthane hautement inflammable. De nombreuses règles de sécurité ont été violées, absence d’issues de secours, de balisage, pas d’extincteurs en nombre suffisant, pas de système de désenfumage, pas d’alarme… Reprendre le procès n’est pas le but de ce billet, la presse régionale en a fait de très bons compte-rendus (cherchez procès Cuba Libre Rouen).
En quoi cela concerne-t-il les loueurs de gîtes et chambres d’hôtes ?
Si je rebondis sur ce procès, c’est que toutes les semaines depuis que j’ai co-créé Accueillir Magazine, je découvre des hébergements qui sont probablement/certainement ERP de 5e catégorie avec locaux à sommeil mais qui ne respectent pas les règles de sécurité.
A chaque formation, je rencontre des porteurs de projet qui ignorent la notion d’ERP, me disent qu’ils vont accueillir 30 personnes dans le bâtiment et construisent le business plan sur une exploitation illégale.
Quelques exemples
- On ajoute des meublés de tourisme aux chambres d’hôtes dans le même bâtiment pour améliorer la rentabilité et la capacité d’accueil de la maison dépasse les 15 personnes.
- On ouvre un restaurant ou une boutique dans la même maison, ce commerce est nécessairement ERP et peut requalifier l’ensemble de la maison y compris les chambres d’hôtes.
- On veut organiser des mariages ou autres réceptions ce qui aboutit à ouvrir la maison à du public extérieur et à devenir ERP.
Involontaire ? Pas toujours !
L’activité de chambres d’hôtes est exemptée de mise en sécurité incendie jusqu’à une capacité de 15 personnes. Il en va de même pour les gîtes et les meublés de tourisme. Parfois, le loueur ou le créateur ajoute une activité sans réfléchir aux conséquences et devient ERP.
La plupart du temps, c’est organisé et le loueur sait parfaitement qu’il enfreint les règles avec le silence des édiles locaux, mais je ne veux pas jeter la pierre aux maires, leur hotte est déjà trop pleine de problèmes. C’est à la préfecture et au SDIS (service départemental d’incendie et de secours) de procéder aux vérifications.
Si je suis sévère, c’est que depuis plus de 10 ans que j’anime ce blog, et particulièrement depuis ce billet datant de 2017, Créer ou reprendre un gîte de grande capacité, attention aux normes ! de nombreuses questions auxquelles j’ai répondu me demandent comment échapper aux règles ERP mais jamais en quoi elles ont du sens et pourquoi elles sont là.
Les normes sont lourdes, trop lourdes et complexes à comprendre. Deux préventionnistes n’auront pas la même position sur la nature des travaux à entreprendre. C’est un gros problème, notamment quand on reprend une de ces grandes propriétés rurales et on sait que gîtes et chambres d’hôtes permettent à ces propriétés de ne pas tomber en ruines et à des territoires de conserver de l’hébergement marchand et une activité économique.
C’est aussi le poids de ces normes qui font que de nombreux hôtels ruraux ferment, le coût des travaux étant trop lourd financièrement. Je suis la première à militer pour revenir à du bon sens pour les petits établissements, il est question que cela se fasse, espérons.
Mais en attendant, le drame du Cuba Libre me permet de rappeler qu’enfreindre les règles de mise en sécurité incendie, c’est du pénal. En l’occurrence, les deux gérants ont été condamnés, à des amendes et 5 ans de prison dont 2 avec sursis plus une interdiction d’exercer une profession en lien avec l’infraction. Avant même le drame, cela aurait pu être un contrôle et une fermeture administrative. Comment dormir sereinement quand son activité peut s’interrompre à tout moment, inutile de penser cacher quoi que ce soit, les photos des clients sur les réseaux sociaux sont là pour témoigner.
N’oublions pas le plus important, depuis le 5 août 2016 et l’incendie du Cuba Libre, ce sont 14 familles plongées dans le deuil qui elles ont pris perpétuité pour la douleur. Celles des gérants sont aussi définitivement affectées. Plus jamais cela ! La sécurité incendie, ce n’est pas qu’une contrainte, cela sauve des vies.